LES RELATIONS EST/OUEST
INTRODUCTION
Après leur victoire sur l’Allemagne nazie, les deux superpuissances (E.U et URSS) ne peuvent s’entendre sur la réorganisation du monde, car elles offrent deux systèmes de pensée, deux modes d’organisation économique, politique et sociale différentes. Elles entrent dans une nouvelle ère de relations plus connue sous le nom de Guerre Froide. Cette expression, popularisée par le journaliste américain Walter Lippmann en 1947, désigne la période de tension durant laquelle les deux grandes organisent de puissants blocs et s’affrontent par États interposés. La Guerre Froide débute avec la rupture intervenue en (1947) et va durer jusqu’à la dislocation de l’URSS en 1991.
I- LA NAISSANCE D’UN MONDE BIPOLAIRE
1- L’origine de la guerre froide
L’alliance des États-Unis et de l’Union soviétique contre l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale commence à se défaire en 1945-1946. Les États-Unis et leurs alliés s’inquiètent, en effet de la façon dont Staline utilise l’Armée rouge afin de s’assurer le contrôle de la plus grande partie de l’Europe centrale et orientale: « glacis défensif ». À la mainmise soviétique sur cette région s’ajoutent les ambitions sur les détroits entre la mer Noire et la Méditerranée, au contact de la Turquie, ainsi que l’installation d’un gouvernement communiste dans le nord de l’Iran et le soutien à la guérilla communiste en Grèce. Dans un célèbre discours à Fulton, le 5 Mars 1946, Churchill dénonce l’expansionnisme soviétique et la menace communiste sur le monde : c’est le discours du « rideau de fer ». Les États-Unis, conscients de la menace communiste décide de protéger l’Europe occidentale.
De leur côté, les Soviétiques redoutent le nouveau rôle mondial que les États-Unis entendent tenir. Ces derniers ont ainsi pris une part déterminante non seulement dans la création du système monétaire international né à Bretton Wood, ainsi que dans l’Organisation des Nations unies (ONU). Enfin, la puissance de l’Armée rouge et le prestige que lui vaut la victoire sur l’Allemagne hitlérienne persuadent Staline que le moment est venu d’assurer une nouvelle expansion du communisme sur le plan mondial.
La méfiance croît encore davantage quand les deux parties rompent toutes deux l’alliance datant de la guerre.
2- 1947 : l’année de la rupture
a- La doctrine Truman et le plan Marshall
S’opposant à la politique de Staline, le président américain Truman appelle alors l’Europe à s’unifier sous l’autorité américaine pour résister à la menace que constitue l’expansionnisme soviétique. Il propose ainsi le 12 mars 1947, la « doctrine Truman », qui vise au « containment » ou « endiguement » du communisme partout dans le monde. Les États-Unis offrent ainsi leur aide à la fois financière et militaire « aux peuples libres qui résistent à des tentatives d’asservissement, qu’elles soient le fait de minorités armées ou de pressions étrangères ». Les premiers pays qui ont bénéficié de l’aide américaine sont la Grèce, la Turquie et l’Iran. La « doctrine Truman » a également pour objectif de créer un consensus politique engageant les Américains dans la guerre froide. Le Congrès engage une série d’enquêtes fortement médiatisées sur les activités procommunistes aux États-Unis, et le maccarthysme marque une période d’anticommunisme acharné. Dans le même temps, les ministres communistes sont exclus des gouvernements auxquels ils participaient en France et en Italie.
Le volet économique et financier de l’endiguement en Europe est confié au Général Marshall. Le 5 juin 1947 dans un discours prononcé devant les étudiants de l’Université de Harvard, il propose une aide économique de grande envergure à tous les pays européens qui en exprimeraient la demande: C’est le Plan Marshall. Il s’agit donc d’une proposition d’aide économique qui en théorie s’adresse à toute l’Europe touchée par la deuxième guerre mondiale. Mais seul les pays de l’Europe occidentale acceptent cette aide, les soviétiques et leurs alliés la rejettent car pour eux l’accepter est synonyme de renoncement à ces principes communistes.
Le 12 Avril 1948, le congrès vote le projet de loi d’application du plan Marshall. Celui-ci équivaut à 13 milliards de dollars répartis principalement sous forme de dons et de prêts. Les 16 Etats bénéficiaires coopèrent au sein de l’OECE (organisation européenne de coopération économique). Au plan intérieur, le « containment » prend la forme d’une traque aux communistes confiée au
Sénateur Joseph McCarthy aidé par le FBI (Federal Bureau of Investigation)
b- La doctrine Jdanov:
Elle est une réplique des communistes, sous la direction de l’URSS, à la doctrine Truman et au Plan Marshall qu’ils considèrent comme une « machine de guerre au service de l’impérialisme américain ». En septembre 1947 à la conférence de Szklarska Poreba en Pologne Jdanov et Malenkov définissent la nouvelle orientation politique stalinienne. Réunissant les partis communistes européens, Jdanov définit une nouvelle ligne qui fait du combat contre les « forces impérialistes » des États-Unis et de leurs alliés une priorité. Staline invente ainsi un ennemi extérieur pour assurer son autorité absolue et éliminer toute dérive à la ligne ainsi tracée par la doctrine Jdanov. Au même moment, il durcit sa politique intérieure en réprimant les anticommunistes et les autres opposants au Stalinisme qui vont peupler les camps du goulag. En octobre est créé le Kominform, « Bureau d’information des partis communistes », tandis qu’en février 1948, le « coup de Prague », qui impose un gouvernement communiste en Tchécoslovaquie, renforce la domination soviétique sur l’Europe centrale et accélère la division en deux blocs.
3-La constitution des blocs
Suite à la rupture de 1947, les différents pays du monde s’alignent soit du côté américain soit du côté soviétique. Ce système d’alliance crée ainsi deux blocs: le bloc de l’Ouest dirigé par les EtatsUnis et celui de l’Est dirigé par l’URSS. Les blocs vont se renforcer politiquement, économiquement, militairement.
a- Dans le bloc de l’Ouest
Politiquement, le containment constitue la doctrine du bloc de l’ouest.
Au plan économique, l’Organisation Européenne de Coopération Économique (O.E.C.E.) est créé en 1948 et deviendra l’Organisation de Coopération et le Développement Economique (O.C.D.E). Entre 1947 et 1951, les États-Unis, dans le cadre du Plan Marshall injectent 13 milliards de dollars (dont 11 milliards dollars en dons) en Europe occidentale.
Dans le domaine militaire et stratégique, l’Organisation des Etats Américains (O.E.A) voit le jour en
1948, en 1950 est créée, l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (O.T.A.N). Le 1er septembre 19511’ANZUS (Australie, New Zélande, United States Security Treaty) qui est un pacte militaire signé à San Francisco, entre l’Australie, la Nouvelle-Zélande et les Etats-Unis. En 1954, l’Organisation du Traité de l’Asie du Sud-est (OTASE) ou Pacte de Manille est créé.
En ce qui concerne les renseignements, les Etats-Unis fondent la CIA (Central Intelligence Agency) Agence centrale de renseignement, en 1947.
b- Dans le bloc de l’est
Du point de vue politique, le Kominform ou Comité d’information des partis communistes est créé en 1947 et la doctrine Jdanov devient la référence du bloc de l’Est
Economiquement, l’URSS fonde le Conseil d’Assistance Economique mutuelle (CAEM, COMECON en anglais) qui est chargé de coordonner les économies des démocraties populaires et de planifier les échanges commerciaux entre-elles.
Militairement, en mai 1955, suite à l’admission de la RFA dans l’OTAN, l’URSS crée le pacte de Varsovie, qui officialise l’autorité soviétique sur les armées des démocraties populaires. La collecte des renseignements dans le camp soviétique est assurée par le KGB (Komitet Gossoudarstvennoï Bezopasnosti) Comité pour la Sécurité de l’État (13 mars 1954).
Avec la mise en place et le renforcement des blocs, les deux superpuissances sont prêtes à l’affrontement.
II- LA GUERRE FROIDE EN EUROPE ET EN ASIE (1947-1953)
1- La guerre froide en Europe
a- En Tchécoslovaquie : le coup de Prague
Au moment de la création du Kominform à Szlarska Poreba, Jdanov fait comprendre aux communistes tchèques qu’ils doivent rompre leur alliance avec les autres partis et ne plus rester minoritaires au sein du gouvernement. Dès lors, Gottwald, le premier ministre communiste, pousse les siens à contrôler la police. Les autres ministres protestent contre ce « noyautage » et il s’ensuit une crise gouvernementale. Le P.C tchèque organise alors d’imposantes manifestations à Prague (17-25 février 1948) qui intimident le président de la République Benes et le font accepter la constitution d’un nouveau gouvernement Gottwald, composé d’une majorité de communistes. Dans les mois suivant, après la mort de Benès, ceux-ci détiennent la totalité des pouvoirs. Ce premier « coup de Prague », voulu par Moscou, s’est accompli sans aucun char soviétique. Mais il n’en suscite pas moins une réaction de peur dans les capitales d’Europe occidentale. La France, la Grande Bretagne et les pays du Benelux concluent en Mars le pacte de Bruxelles et réclament aux Etats – Unis une protection militaire.
b- La première crise de Berlin (1948-1949)
En juillet 1945, à la conférence de Potsdam, les trois dirigeants des principales puissances alliées Churchill (puis son successeur, le travailliste Attlee), Staline et Truman s’accordent sur le partage de l’Allemagne et de l’Autriche en quatre zones d’occupation : américaine, britannique, française et soviétique .Berlin doit être aussi divisée en quatre zones. Seulement après le coup de Prague, en février 1948, les Occidentaux décident de transformer leur trois zones en un État souverain ouest-allemand (conférence de Londres, en Avril-Juin 1948). La première phase du processus est la création du Deutsche Mark, qui devient le 20 juin la monnaie commune aux trois zones occidentales. Staline proteste contre cette division de fait de l’Allemagne et, le 24 juin 1948, il profite de l’isolement géographique de Berlin pour bloquer tous les accès terrestres et fluviaux des secteurs occidentaux. Plus de deux millions d’habitants et trente mille soldats alliés se retrouvent pris en otage derrière le rideau de fer. Dans un premier temps, les Alliés envisagent de forcer le blocus, selon la proposition du général Clay mais celle-ci est vite écartée. Pour sauver la ville de l’asphyxie, Britanniques et Américains se décident finalement à mettre en place un pont aérien, c’est-à-dire d’assurer le ravitaillement (vivres, carburant, charbon) par avion. Au total, deux millions et demi de tonnes de fret (dont le charbon constitue les deux tiers) sont acheminés par 275 000 vols. Le 12 mai 1949, conscient de son échec, Staline décide de lever le blocus. L’Allemagne est durablement coupée en deux et les occidentaux regroupent leur zone d’occupation et créent la république Fédérale d’Allemagne, le 08 Mai 1949 alors que les soviétiques créent la République Démocratique d’Allemagne le 7 octobre 1949.
2- Le grand choc en Asie
a- La victoire des communistes en Chine
Roosevelt, puis Truman ont voulu parrainer la chine dans le concert des Grands : elle a un siège de membre permanent au conseil de sécurité à l’O.N.U. Mais les Américains ne peuvent empêcher, en 1946, la reprise de la guerre civile, interrompue depuis 1937, entre les nationalistes de Jiang Jieshi (Tchang Kaï Tcheck) et les communistes de Mao Zédong. Soutenant les premiers, ils assistent impuissants, puis indifférents, à la défaite militaire et politique d’un régime corrompu et impopulaire. Dès 1947 d’ailleurs, leur politique d’endiguement s’applique propriétairement à l’Europe occidentale.
Le 1er octobre, la République populaire est proclamée en chine. Jiang Jieshi doit se réfugier avec les débris de son armée dans l’ile de Formose (Taiwan), ou il maintient la « République de chine », seul Etat chinois reconnu par les Américains.
Staline, donnant lui aussi la priorité à l’Europe, n’a pas encouragé le parti communiste chinois dans son entreprise. Mais en 1949, il mesure les avantages de cet élargissement spectaculaire du camp socialiste. L’U.R.S.S. demande en janvier 1950 que la chine nationaliste cède à la République populaire la place qu’elle occupe à L’O.N.U. Le Conseil de sécurité et les Etats-Unis refusent ; les Soviétique ripostent en boycottant l’O.N.U. et tous ses organismes.
b- La guerre en Corée
Après la défaite japonaise en août 1945, la Corée ancienne colonie japonaise est divisée en deux zones d’influence au niveau de la 38e parallèle :
- au Sud, la République de Corée, proaméricaine, dirigée par Syng Man Rhee
- au Nord, la République populaire de Corée, prosoviétiques, dirigée par Kim Il Sung.
Entre 1948 et 1949 les forces soviétiques et américaines quittent leurs zones d’occupation. Entre temps le voisin du nord, la Chine devient communiste. Encouragé peut-être par les déclarations de Dean Acheson (secrétaire d’État américain) du12 janvier 1950 dans lesquelles il disait : « le périmètre de défense des États-Unis comprenait les îles Aléoutiennes, les îles Ryükyü, le Japon et les Philippines », l’armée nord-coréenne envahit le sud, avec l’accord de Staline. Les Nations unies condamnèrent l’agression nord-coréenne et décidèrent de venir en aide à la Corée du Sud. Les Etats-Unis profitèrent du boycott par l’URSS du conseil de sécurité pour se faire confier le commandement d’une force militaire onusienne pour « sauver la Corée d’une invasion étrangère. Cette force à majorité américaine et conduite par le général Mc Arthur parvint à refouler les Nord-Coréens jusqu’à la frontière avec la Chine communiste le 26 octobre 1950. La Chine réagit en mobilisant 500 000 volontaires pour défendre la Corée du Nord. Le 31 octobre plusieurs divisions dirigées par le général Lin Biao entrèrent en Corée et repousse les américains jusqu’à Séoul. Craignant le désastre, le général Mc Arthur menace d’utiliser la bombe atomique. Il est limogé et remplacé par le général Ridgway qui réussit à stabiliser le front autour du 38e parallèle : c’est le statu quo. Des discutions longues et âpres aboutissent à la signature de l’armistice de Pan Mun Jom le 27 juillet 1953, consacrant ainsi la partition de la Corée en deux Etats indépendants.
Après la guerre de Corée l’URSS avait compris qu’il était de son intérêt de reprendre son siège au Conseil de sécurité de l’ONU, pour éviter l’utilisation par les Etats-Unis, de l’organisation à ses propres fins. La tension baisse entre les deux grandes puissances.
III - COEXISTENCE PACIFIQUE ET NOUVELLES CRISES (1953-1962)
Au milieu des années 50 les relations Est –Ouest évoluent vers un dégel appelée coexistence pacifique Celle-ci, rendue possible grâce à la combinaison de plusieurs facteurs, s’est manifestée par la signature de nombreux accords. Ce dégel n’exclut pas pourtant de nouvelles crises.
1-Les facteurs de la coexistence pacifique
a- L’équilibre de la terreur :
Les Américains étaient les seuls à posséder l’arme atomique, ce qui leur conférait une supériorité militaire sans précédente. Les Soviétiques mirent fin à ce monopole en se dotant de la bombe A (1949), de la bombe H (1953) et les fusées intercontinentales(1957).Etant parvenus à un niveau technologique équivalent, les deux Grands se devaient, pour éviter un affrontement nucléaire général, de cohabiter et de reconnaître leurs sphères d’influence respectives. Ainsi on est arrivé à une situation où l’usage de la bombe équivaudrait à un suicide collectif. Dès lors on ne fabrique plus des armes pour faire la guerre mais pour dissuader l’ennemi : c’est l’équilibre de la terreur.
b- Au plan politique et économique
-Au plan politique, à la mort de Staline le 05mars 1953, Khrouchtchev arrive au pouvoir et ouvre une nouvelle ère dans les relations Est- Ouest. Le 20éme congrès du PCUS en février 1956 marque son triomphe politique. Il se déclare favorable à une « coexistence pacifique » et dissout le Kominform le 17 avril 1956.
Aux Etats-Unis, Eisenhower élu en 1953, écarte de son entourage les durs anti-communistes et remplace la politique du « Containment » par la politique du « Roll back ». L’application de cette nouvelle politique est confiée à John Foster Dulles, nouveau secrétaire d’Etat.
Au plan économique, l’URSS pour combler son retard a besoin de la coexistence pacifique afin d’acquérir la technologie occidentale tout en réduisant ses dépenses militaires considérables. L’objectif est d’éviter l’implosion du monde communiste par une crise sociale. Quant aux Américains, ils pensent que les pays de l’Europe de l’Est leur offrent des perspectives de marchés alléchants dont la conquête n’est possible qu’avec la coexistence pacifique
d- Au plan international
L’émergence du Tiers Monde à la suite de la conférence de Bandoeng (1955) et la création du mouvement des non-alignés à la conférence de Belgrade (1961) changent les règles du jeu au plan international et consacre l’avènement d’une 3éme force politique : le 1/3 monde. Avec l’adhésion du 1/3 monde aux principes de coexistence pacifique, l’affrontement direct entre les deux grands cède la place à une compétition de type nouveau. Dans leurs assauts de séduction en direction des Etats du tiers monde, Américains et Soviétiques comprennent que l’avantage est à celui qui manifeste le plus une volonté de paix et un respect des souverainetés nationales.
2- Les manifestations de la coexistence pacifique
La coexistence pacifique se manifeste au plan politique par des contacts entre les dirigeants des deux superpuissances et la résolution de nombreuses crises : en juillet 1953 l’armistice de Pan Mun Jom met fin à la guerre en Corée, en juillet 1954 le traité de Genève met fin à la guerre en Indochine. En mai 1955 l’URSS reconnaît la République Fédérale d’Allemagne dont le chancelier Adenauer se rend en visite officielle à Moscou. L’URSS adhère à l’UNESCO et le Kominform est dissout en 1956. Cette nouvelle ère se concrétise avec les rencontres entre Khrouchtchev et Eisenhower en 1956 au Royaume-Uni, en 1959 aux États-Unis, en1960 en France. Khrouchtchev rencontre aussi Kennedy en 1961 à Vienne : c’est l’apogée de la coexistence pacifique.
-Les accords militaires
- 1963 : Traité de Moscou interdisant les expériences nucléaires dans l’atmosphère (100 pays signent sauf la France et la Chine qui sont entrain de mettre au point leur propre bombe) 1967 : Traité sur la dénucléarisation des fonds marins et de l’espace cosmique.
- 1968 : Traité sur la non-prolifération de l’arme nucléaire. Refus de la France, de la Chine et de l’Inde Ce dégel n’exclut pas pourtant de nouvelles crises.
3- les crises de la coexistence pacifique
a- L’insurrection hongroise
En octobre 1956, la déstalinisation achoppe sur le soulèvement populaire hongrois, qui d’antistalinien devient vite antisoviétique. Les mesures de déstalinisation sont jugées insuffisantes, malgré l’action d’Imre Nagy en faveur d’une libéralisation. Déclenché conjointement par les ouvriers et les étudiants, le mouvement insurrectionnel — par lequel Nagy, qui a déclaré la neutralité de la Hongrie et son retrait du pacte de Varsovie, se laisse dépasser — est réprimé dans le sang avec l’intervention des blindés soviétiques à Budapest le 1er novembre. La vieille garde prosoviétique, dirigée par János Kádár, est ramenée au pouvoir, et Imre Nagy est condamné à mort (1958). En Occident, les événements de Hongrie sont suivis avec une tension croissante, notamment dans les milieux de gauche. De nombreux intellectuels et artistes quittent le parti communiste, notamment en France et en Italie.
La répression de l’insurrection hongroise a montré les limites de la déstalinisation, soit l’impossibilité de compromettre l’homogénéité idéologique du camp communiste et de remettre en question son unité politique, militaire et économique. La construction du mur de Berlin (1961) et la crise des fusées de Cuba (1962) entraîneront une dégradation progressive des relations entre l’URSS et les États-Unis, sans toutefois interrompre le dialogue. Les grands thèmes de l’équilibre mondial continueront de faire l’objet de rencontres au sommet, même après la destitution de Khrouchtchev (1964) et l’arrivée au pouvoir de Leonid Brejnev, qui laisse pourtant présager le retour en force des méthodes staliniennes.
b-La crise de SUEZ
Une nouvelle crise va naître à Suez. Depuis 1952 le colonel Nasser a pris le pouvoir en Egypte; pour sortir son pays du sous-développement il souhaite mener une politique de grands travaux qui passe par la construction du barrage d’Assouan. Mais il manque de fonds et il demande l’aide financière de la France et du Royaume-Uni qui sont les principaux actionnaires de la Compagnie du canal de suez.
Les deux puissances refusent. Nasser répond en soutenant la lutte des Algériens pour leur indépendance et en menant une politique anti-israélienne. Et surtout le 26 juillet 1956 il nationalise la Compagnie du canal de Suez. Le ton monte: le Royaume-Uni et la France poussent Israël à porter une attaque dans le désert du Sinaï et bombardent Port-Saïd sous prétexte de protéger la zone du canal. C’est là que les deux grands vont montrer leur domination: les E.U demandent à l’ONU d’intervenir et l’URSS envoie l’ultimatum à la France et au Royaume-Uni les menaçant de la bombe atomique. Les anglais et les français s’inclinent et l’ONU envoie une force d’interposition dans le Sinaï pour 10 ans. Nasser a gagné. La France et la Grande-Bretagne sont discréditées aux yeux du tiers-monde et réalisent qu’ils ne peuvent plus rien décider sans l’accord des deux supers grands. Cela prouve aussi que les deux grands sont maintenant complices pour se partager le monde.
c- La deuxième crise de Berlin (1961)
Entre 1949 et 1961, près de trois millions d’Allemands de l’Est transitèrent par Berlin pour passer en RFA. Cette hémorragie démographique était un désastre économique pour la RDA, car c’étaient surtout des ingénieurs, des médecins et des ouvriers spécialisés qui commirent le« délit de fuite ». En même temps, elle était une catastrophe politique en ce qu’elle portait atteinte à l’image de marque officielle de la RDA. En juin 1961, Kennedy et Khrouchtchev se rencontrent à Vienne. Khrouchtchev annonce qu’il va signer un traité de paix avec l’Allemagne de l’Est, ce qui priverait les Etats-Unis de leur accès à Berlin-Ouest. Kennedy juge la situation inacceptable et la conférence ne mène à rien. Pour arrêter cette hémorragie humaine, Khrouchtchev ordonne, dans la nuit du 13 août 1961 la construction du mur de Berlin entre le secteur soviétique et les trois secteurs occidentaux. Ce mur de la « honte » marque la partition de la ville et constitue l’un des symboles majeurs de la guerre froide en Europe. La réaction des Occidentaux se limita à des protestations verbales et à des gestes symboliques : la visite à Berlin-Ouest du général Lucius D. Clay, l’organisateur du pont aérien, et le renforcement de la garnison américaine par 1500 hommes.
d- La crise des missiles cubains (1962)
La crise des missiles cubains mit plus nettement en évidence la menace d’une guerre nucléaire. En janvier 1959, les guérilleros de Fidel Castro avaient renversé le dictateur Fulgencio Batista, soutenu par les Etats-Unis. Le nouveau régime prit une série de mesures qui lui valurent l’hostilité croissante de Washington : en 1959, démantèlement des latifundia ; signature d’un accord commercial avec l’URSS en mai 1960. A titre de représailles, le gouvernement américain, soumis à la pression des milieux d’affaires, met en place un embargo économique de l’île en octobre 1960 et, le 2 janvier 1961, il rompt les relations diplomatiques avec la Havane. En même temps, la CIA recrutait des « forces anticastristes » parmi les réfugiés cubains. Au début du mois d’avril, Kennedy donna son accord à un projet d’invasion de l’île, tout en refusant d’engager des troupes américaines. Le débarquement, qui eut lieu le 17 avril 1961 dans la Baie des Cochons, fut un désastre. En juillet 1961, Cuba signifie son appartenance au « bloc socialiste ». Le 4 septembre 1962, le pays conclut un accord d’assistance militaire avec l’URSS et, une semaine plus tard, Moscou déclare que toute attaque contre Cuba provoquerait une riposte nucléaire. Le Congrès américain pour sa part vote le 3 octobre une résolution qui met en demeure contre toute « action subversive dans l’hémisphère occidental ».Le 14 octobre 1962, un avion américain U2 photographie sur l’île de Cuba des rampes de lancement pour missiles nucléaires à moyenne portée (IRBM et MRBM), capables d’atteindre le territoire américain. En même temps, la Maison Blanche apprend que 24 cargos soviétiques transportant des fusées et des bombardiers Iliouchine font route vers Cuba
Dans la journée du 22, Kennedy, après avoir hésité entre l’inaction et le bombardement des rampes de lancement, se décide pour le blocus maritime de l’île. Cette « riposte graduée », proportionnée à la menace, laisse à Khrouchtchev le choix entre l’escalade ou la négociation. Mais Kennedy utilise la plus grande fermeté, afin de forcer Khrouchtchev à reculer. Le 24 octobre, les premiers cargos soviétiques font demi-tour. Le dénouement de la crise conduit à l’installation d’un téléphone rouge, ligne directe entre le Kremlin et la Maison Blanche, et l’ouverture de négociations sur la limitation des armements.
IV- LE MONDE DE LA « DÉTENTE » A LA FIN DE LA GUERRE FROIDE 1962 – 1991
La détente est une période d’accalmie entre les deux blocs qui se manifeste par la signature de nombreux accords politiques et militaires et dont le prolongement va entraîner la fin de la Guerre
Froide
1- Les facteurs de la détente
a- Les fissurations des blocs
-Dans le bloc de l’Ouest, la tutelle américaine est contestée en Europe Occidentale. Le Général De Gaule affirme une réelle volonté d’indépendance face aux Etats- Unis. Ainsi il convertit des millions de dollars de la Banque de France en or, ce qui entraîne la chute du dollar. Il dote son pays d’une force nucléaire et se retire du commandement intégré de l’OTAN en 1966, à la suite de l’affectation des forces françaises stationnées en Allemagne au commandement des alliés de l’Europe. La France agit en toute liberté dans les affaires du monde sans l’aval des USA. Elle reconnaît la Chine de Mao en 1964 et condamne l’interventionnisme américain au Vietnam.
-Dans le bloc de l’Est, la Chine dénonce le modèle soviétique. Elle reproche à Khrouchtchev sa politique de déstabilisation et condamne la coexistence pacifique avec les Etats-Unis. En 1964, sans l’aide des soviétiques elle fait exploser sa première bombe atomique. L’URSS doit en même temps gérer la volonté d’autonomie des démocraties populaires. L’armée rouge a réprimé en 1956 la politique libérale d’Imre Nagy en Hongrie .En Tchécoslovaquie, la volonté d’Alexandre Dubcek de suivre la voie libérale est violemment réprimée en août 1968 par les troupes du Pacte de Varsovie : c’est le printemps de Prague.
b)- Un contexte international favorable à la détente
Dès le début de son mandat en janvier 1969, Richard Nixon cherche partout les moyens de sortir les Etats-Unis du bourbier vietnamien. En effet, à partir de 1968, plus de 500 000 soldats américains sont mobilisés pour combattre le Viêt-Cong aidé par la Chine et l’URSS. Malgré les moyens militaires énormes déployés, les Etats-Unis s’enlisent dans une guerre très meurtrière et très contestée par l’opinion publique américaine. Cette volonté de trouver une solution à la guerre du Vietnam pousse l’administration à élaborer une nouvelle politique extérieure fondée sur la détente dans les relations Est-Ouest.
En URSS, le coût de la course à l’armement empêche le développement économique et social. C’est pourquoi les soviétiques ont besoin d’une détente pour trouver des moyens nécessaires à leur redressement économique.
2- Les manifestations de la détente
La détente se manifeste par la signature de nombreux accords entre les deux blocs.
-Au plan économique, l’embargo économique américain de 1949 est abandonné, ce qui se traduit par une progression des échanges Est – Ouest de 500%.
-Au plan du désarmement, En 1968, s’engagent des négociations sur la limitation des armes stratégiques (Strategic Arms Limitations Talks – SALT). Après de longs pourparlers, Brejnev et Nixon signent le 26 mai 1972, les accords SALT I. Ils reconnaissent l’égalité en capacité de destruction réciproque.
Dès 1973, s’ouvre des négociations SALT II, en raison de l’apparition de nouvelles armes n’entrant pas dans les catégories définies par SALT I (engins sol-sol, armes chimiques et bombe à neutrons). Les négociations aboutissent en 1979 à la signature des accords SALT II. En 1973 à Washington et en 1974 à Moscou Nixon et Brejnev signent des accords de coopération technique ainsi qu’un traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. En 1972 le chancelier Willy Brandt entreprend la politique de rapprochement entre les deux Allemagnes (OSTPOLITIK). Elles se reconnaissent mutuellement et sont admises à l’ONU en 1973. La détente atteint son apogée en Europe en 1975 avec la conférence d’Helsinki sur la sécurité et la coopération .Les 35 états signataires s’engagent à maintenir le statu quo politique en Europe et à respecter les droits de l’homme et les libertés fondamentales.
En 1971, Kissinger se rend en Chine pour préparer l’admission de la Chine populaire à l’ONU avec siège et droit de veto au Conseil de Sécurité en lieu et place de Formose. En septembre 1971, la Chine populaire est admise à l’ONU. Nixon se rend alors en voyage officiel en Chine en février 1972. Cette reconnaissance officielle de la Chine communiste par les États-Unis, facilite la signature des accords de Paris en 1973 qui mettent fin à la guerre du Vietnam.
3 La dégradation de la détente ou la guerre fraîche 1975-1985
Les relations Est-ouest connaissent un nouveau refroidissement au moment où la détente avait presque atteint son apogée. Brejnev profite de l’affaiblissement des États-Unis par l’affaire Watergate pour relancer les hostilités.
-En Asie le Vietnam du nord envahit celui du sud avec l’aide de Moscou en 1975. En 1979 l’Ayatollah Khomeiny renverse le Shah d’Iran et tout le personnel de l’ambassade des Etats-Unis est pris en otage par les gardiens de la révolution qui piétinent et incendient le drapeau américain. La même année l’armée rouge envahit l’Afghanistan pour soutenir le régime communiste de Babrack Kamal.
-En Europe les soviétiques remplacent leurs missiles de moyenne portée SS4 par des missiles d’une portée de 4 500 km SS20. En réaction, les Etats-Unis implantent en Europe de fusées Pershing II et les Cruisers de 6 000 km de portée. Ainsi l’Europe redevient le cœur d’une apocalypse nucléaire. Le président Jimmy Carter envisage une politique de fermeté et appelle au boycott des jeux olympiques de Moscou de 1980. C’est dans ce contexte d’une Amérique qui doute que Ronald Reagan arrive au pouvoir en 1981. Il qualifie l’URSS « d’Empire du mal ». Il accroît le budget de la défense et construit 100 missiles intercontinentaux et 100 bombardiers stratégiques. En 1983, il annonce son programme IDS (Initiative Défense Stratégique) ou la « guerre des étoiles » qui vise à élaborer dans l’espace un bouclier destiné à protéger le territoire américain contre toute attaque nucléaire. Son coût est de 100 milliards de dollars, ce qui représente un défi technologique et financier que l’URSS ne peut relever. En même temps, il soutient les guérillas au Mozambique, au Nicaragua et en Afghanistan.
Face à une situation économique désastreuse, Michaël Gorbatchev arrivé au pouvoir en 1985 se lance dans une détente avec les Etats-Unis. Il entreprend une nouvelle politique, dont l’échec entraînera la fin de la Guerre Froide.
4-La fin de la Guerre Froide 1985- 1991
Pour sortir l’URSS de la stagnation économique, constaté depuis l’ère Brejnev, Michaël Gorbatchev élu en 1985, lance un vaste programme de réformes appelé Perestroïka. La Perestroïka vise à limiter les dépenses militaires afin de trouver les moyens nécessaires pour une réforme économique qui passe par : la modernisation des systèmes de production, pour réduire le fossé économique qui sépare l’URSS de l’Occident, la transparence dans la gestion des affaires publiques(Glasnost). Il vise entre autre le développement complet de la démocratie, la critique et l’autocritique dans tous les domaines de la société et l’autonomie sociale
Gorbatchev s’engage à restaurer l’image de son pays en se retirant de tous les conflits périphériques comme celui de l’Afghanistan et en acceptant la démolition du mur de Berlin dans la nuit du 9 et 10 novembre 1989.
L’année 1989 marque un tournant dans l’histoire. En quelques mois tout l’édifice érigé par Staline entre 1945 et 1949 s’effondre comme « un château de carte » à cause des difficultés économiques et de la contagion démocratique venue de l’ouest, qui propose un modèle politique conforme à l’aspiration des peuples, pour qui le communisme apparaît comme une doctrine importée.
Le 05 avril 1989, le Général Jaruzelski, en Pologne, signe un accord avec Lesh Walesha, dirigeant du syndicat non communiste, Solidarnosc. La Hongrie abandonne le communisme en mai 1989, et en novembre-décembre, la Tchécoslovaquie, la Bulgarie et la Roumanie se débarrassent à leur tour du modèle stalinien Gorbatchev est conscient que l’accélération des réformes est une nécessité historique pour protéger l’URSS l’implosion. Mais il est confronté à l’opposition des conservateurs qui l’accusent de brader les intérêts de la grande URSS. Ils profitent de son séjour estival en Crimée pour organiser un coup d’état, le 18 août 1991. Malgré leur échec ils continuent le processus de liquidation de l’Etat soviétique au profit d’une vague Communauté des Etats Indépendants (C E I) dont les contours ont été définis à Minsk (Biélorussie) le 8 décembre et à Alma Hatta (Kazakhstan) le 21 décembre. Gorbatchev isolé et conscient de son échec démissionne le 25 décembre 1991, et signe en même temps l’acte de décès de l’URSS et de la Guerre Froide
CONCLUSION
Au lendemain de la seconde Guerre Mondiale, le monde va vivre et pendant longtemps au rythme des affrontements Est / Ouest dans le cadre de la Guerre Froide. Cependant un climat de paix relatif a été maintenu grâce à l’équilibre de la terreur. Finalement les contradictions internes au sein du bloc de l’Est ont favorisé sont éclatement et la dislocation de l’URSS au début des années 90. Le monde jusque-là bipolaire s’oriente vers un ordre unipolaire avec un leadership incontestable des Etats-Unis d’Amérique.