L’ASIE PACIFIQUE : LES FACTEURS D’ÉMERGENCE ET LEURS LIMITES
INTRODUCTION
L’Asie Pacifique est un espace géographique qui regroupe des pays de l’Asie de l’Est et du Sud-est ayant une ouverture sur l’Océan Pacifique. Les pays de l’Asie Pacifique constituent un nouveau foyer de richesse inséré dans l’économie mondiale, avec une population agricole qui décroît et un développement économique significatif. C’est le troisième pôle de la Triade, derrière l’Amérique du Nord et l’Union Européenne.
Avec un poids démographique de plus de 2 milliards d’habitants, l’Asie Pacifique est devenue un espace structurellement incitatif pour les investisseurs, où les taux de croissance économiques moyens sont de l’ordre de 6 %. L’émergence économique de l’Asie Pacifique est le résultat de la combinaison de plusieurs facteurs. Cependant, le modèle Asie Pacifique est fragilisé par des facteurs endogènes ou exogènes.
I- LES FACTEURS DE LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE
1- Un milieu naturel favorable
L’ouverture maritime (Océan Pacifique et Mer Intérieure), permet à l’Asie Pacifique d’être en contact permanent avec le reste du monde et de développer des activités portuaires comme le commerce la pêche et les transports. Le Pacifique de par sa présence a créé un espace harmonieux favorable à l’implantation de l’homme et au développement de ses activités.
Le relief montagneux entraîne l’abondance des précipitations et favorise l’implantation de barrages hydro-électriques et hydro-agricoles grâce à un réseau hydrographique très dense : le Yang Jijiang le Huang Hé et le Mékong. Les plaines (20 %) de la superficie), arrosées par les pluies de mousson qui peuvent atteindre 3000 mm/an sont favorables au développement des activités agropastorales. A ces atouts on peut ajouter l’abondance des ressources minières et énergétiques, base de l’industrialisation de l’Asie Pacifique.
2- Les facteurs historiques
Dans la seconde moitié du XIXe, l’empereur Mutsuhito lance la révolution Meiji, qui a permis au Japon de se mettre à l’école occidentale et de s’industrialiser à travers un transfert de technologies et de capitaux. Ainsi le Japon devient un modèle pour les pays de l’Asie Pacifique.
Après la Seconde Guerre Mondiale, l’opposition entre l’Est et l’Ouest dans le cadre de la Guerre Froide, a favorisé l’afflux massif de capitaux américains vers certains pays de L’Asie Pacifique pour deux raisons :
- endiguer le communisme par des moyens financiers,
- montrer à la population et aux élites que le capitalisme libérale est la voie la plus rapide et la moins contraignante pour accéder au développement.
Ainsi des transferts de technologies et de capitaux furent organisés vers le Japon, et vers certains pays qui deviendront les Nouveaux Pays Industrialisés: Taiwan, Corée du Sud, Hong Kong, Singapour.
3- Le potentiel humain
Avec plus de 2 milliards d’habitants, l’Asie Pacifique est le marché de consommateurs le plus important du monde, ce qui attire les investisseurs étrangers. En effet les besoins en produits de consommation courante et en biens d’équipement de la population sont énormes. Les entreprises américaines et européennes délocalisent certaines de leurs activités en Asie, pour profiter de la main d’œuvre bon marché, et de la capacité d’entreprendre des asiatiques.En plus, les valeurs culturelles asiatiques fondées sur la discipline, le travail, et le respect de l’autorité, constituent des facteurs de stabilité sociale indispensables au développement économique.
4- L’impact de la croissance japonaise
Au sortir de la 2nd GM, le Japon est affaibli et dépendant des Etats-Unis. Il connaît ensuite un développement rapide selon un processus qui s’est ensuite imposé comme un modèle dans d’autres pays d’Asie
La croissance japonaise est déterminante dans le développement des autres pays de l’Asie Pacifique. En effet les coûts de production très élevés, l’absence de ressources énergétiques et minières la saturation des marchés d’investissement, ont poussé les japonais à délocaliser leurs activités industrielles dans l’espace Asie Pacifique.
La Corée du Sud, Taiwan, Singapour, et Hong Kong constituent la première génération de pays ayant bénéficié de la croissance Japonaise. Leur niveau de développement est tel qu’on les appelle les Nouveaux Pays Industrialisés (NPI) de première génération ou Dragons d’Asie. La Malaisie, l’Indonésie, la Thaïlande et la zone côtière de la Chine, constituent la deuxième génération de pays ayant bénéficié des capitaux japonais mais aussi de la croissance des Dragons, on les appelle les Nouveaux Pays Industrialisés (NPI) de 2e génération ou Tigres. Ils ont un niveau de développement inférieur à celui des Dragons.
5- L’importance des investissements étrangers
Depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale l’Asie Pacifique a connu un afflux massif d’investissements étrangers. Les premiers investissements ont été réalisés par les américains dans la perspective d’endiguer le communisme en Asie. Les performances économiques des Nouveaux Pays Industrialisés combinées aux salaires bas et à la qualité des ressources humaines, ont contribué à l’afflux des capitaux privés internationaux dans cette partie de l’Asie. Ainsi les entreprises se modernisent et s’internationalisent grâce à des capitaux venus d’Europe, d’Amérique et du Japon. Exemple : en 2008, le volume des investissements étrangers en Chine est estimé à plus de 147,791 milliards de dollars.
La recherche du profit et l’incapacité de certaines entreprises à respecter les normes environnementales dans les pays développés comme les USA, le Canada, le Japon, l’Allemagne, ont conduit à des délocalisations vers les Nouveaux Pays Industrialisés d’Asie Pacifique.
Ainsi, l’Asie Pacifique est arrivée à maîtriser les technologies de pointe : électronique de masse, technologie des robots de première génération, technologie du textile synthétique.
L’Asie Pacifique devient ainsi une zone de production de nombreuses composantes électroniques qui sont assemblées dans d’autres régions monde.
II- L’ASIE PACIFIQUE : UNE ZONE DE PROSPÉRITÉ ÉCONOMIQUE
L’émergence économique des pays de l’Espace Asie-Pacifique se traduit par une importante production de richesse qui facilite leur insertion dans l’économie mondiale.
- L’Asie orientale représente près du quart de la richesse mondiale. La croissance économique de la Chine (10 % par an) illustre ce dynamisme.
- Cet espace représente désormais 1/5 des échanges internationaux. L’ouverture économique de la Chine depuis 1979 explique ce dynamisme.
En vingt-cinq (25) ans l’Asie pacifique s’est développée 3 fois plus vite que l’Amérique et 6 fois plus vite que l’Afrique. Depuis la fin des années 70, la croissance des NPI où dragons (Hong Kong, Taiwan, Singapour et Corée du Sud) est régulièrement supérieure à 7 %. Elle a un impact positif sur le niveau de vie de populations l’importance des PIB/habitant l’espérance de vie s’est allongée et dépasse souvent les 65 ans : Singapour (77 ans), la Malaisie (71,4 %). Au niveau des structures socioprofessionnelles on note un recul du secteur primaire et un gonflement du secondaire et du tertiaire.
L’émergence économique de l’Asie pacifique se manifeste aussi par une industrie et un commerce extérieur très dynamique grâce à la diversification et la haute productivité de la main-d’œuvre. Cette performance est attestée par la part importante de l’industrie dans le PIB des pays de l’espace (43 %) pour la Corée du Sud, 40 % pour la Thaïlande).
Le dynamisme industriel se traduit par un véritable boom de l’activité commerciale l’Asie pacifique est un géant du commerce mondial avec plus de 25 % des transactions de marchandises dans le monde. L’expansion de l’aire de puissance asiatique s’illustre également par le développement de grandes métropoles qui regroupent toutes les fonctions économiques productives. On peut citer
Tokyo, Séoul, Shanghai, Singapour et Hong-Kong
III- LES LIMITES DES FACTEURS D’ÉMERGENCE
1- Le poids du passé
Il y a en effet dans cette région du globe des tensions inter-étatiques et des facteurs d’insécurité. Il y a d’abord des conflits internes.
Résistance des Ouighours dans le Xinjiang et des Tibétains en Chine, mouvements séparatistes en Indonésie (Ache, Kalimantan, Irian Jaya).Il y a aussi des conflits inter-étatiques territoriaux. Pour citer quelques exemples : conflits frontaliers : (Chine – Vietnam, Corée du Nord-Coréen du Sud, Thaïlande, Laos, Thaïlande- Cambodge, Indonésie-Malaisie).
On peut, pour résumer, distinguer trois zones de tensions majeures : la péninsule coréenne, le détroit de Taiwan et la mer de Chine.
Les puissances géostratégiques :
Le Japon a longtemps limité son rôle géopolitique après la seconde guerre mondiale. L’article 9 de la constitution lui interdisait l’usage de la force pour régler les problèmes internationaux. Ce pays change désormais d’attitude. Son armée désignée comme une force d’autodéfense peut être considérée comme la 4ème armée au monde. Des troupes japonaises ont participé à la coalition en Irak. Désormais, l’Etat-major Japonais considère que le premier ennemi potentiel est la Chine. La Chine : c’est une puissance nucléaire et l’une des forces de son armée repose sur l’importance de ses effectifs. Dans ce domaine, elle apparaît comme la future grande puissance.
Les Etats-Unis jouent aussi dans la région un rôle important. La 7ème flotte américaine est prête à défendre dans la région les intérêts du Japon, de Taiwan et de la Corée du Sud. Dans ce contexte, l’unité de cette région du globe semble hypothétique. Pourtant des tentatives de construction régionales apparaissent.
2-Des tentatives de constructions régionales difficiles
On peut évoquer l’ASEAN, Association des Etats du Sud-Est asiatique, créée en 1967 dans le contexte de la guerre froide. Elle réunit Brunei, le Cambodge, l’Indonésie, le Laos, Myanmar Birmanie, la Malaisie, les Philippines, Singapour, la Thaïlande et le Vietnam. La Chine est associée aux négociations mais à l’origine l’ASEAN a été construite en opposition à la domination Chinoise. A terme, en 2010-2015, il est envisagé de créer une vaste zone de libre-échange associant les pays précédemment cités à la Chine, au Japon et à la Corée du Sud. AFTA (Asian Free Trade Area). L’APEC, Coopération Economique de l’Asie Pacifique, associe tous les pays de notre ensemble à l’Australie, aux Etats-Unis, à la Russie, au Canada, au Mexique et au Chili. C’est une organisation informelle qui permet entre autres aux E-U d’affirmer le leadership dans la région. L’Asie Orientale est donc concernée par plusieurs expériences de construction régionale dans le domaine économique, mais il n’y a pas dans l’Asie Orientale d’intégration politique comme dans l’Union européenne. De plus aucune de ces organisations n’a une identité correspondant exactement à l’aire de l’Asie orientale.
3-Les exces de la nature
Les montagnes et les plateaux qui occupent 65 % de la superficie constituent des limites au développement de l’Asie Pacifique. Ils entraînent des déséquilibres dans la mise en valeur et l’occupation humaine de l’espace. Les densités des hauts plateaux varient de 1 à 5 habitants/km2, alors que les plaines sont soumises à une forte pression démographique et économique.
L’Asie Pacifique est soumise à une forte instabilité géologique, qui se manifeste par des séismes, des éruptions volcaniques pouvant occasionner lorsqu’elles ont lieu dans l’Océan, des tsunamis comme celui qui a ravagé l’Indonésie le 26 décembre 2004.
Le climat présente aussi des difficultés assez fréquentes avec les typhons, les ouragans et les inondations. Ces cataclysmes portent très souvent préjudices au aménagement hydro-agricoles, et aux investissements économiques. A ces difficultés s’ajoutent l’insularité de cet espace (avec plus de 13 600 îles et îlots), qui constitue un frein à la maîtrise de l’espace, et le SRAS (Syndrome Respiratoire Aigu Sévère) qui a décimé les élevages de volaille.
4- Le poids démographique et les problèmes sociaux
La forte croissance démographique pose le problème de la prise en charge de la population des pays de l’Asie Pacifique. Des problèmes d’éducation, de santé, de sécurité, se posent avec acuité. L’importance de la population se traduit par des PNB/habitant relativement faible. Le cas le plus spectaculaire est celui de la Chine qui a le 2e PNB mondial (4733,57 milliards de dollars en 2009) mais se place au 146 e rang mondial sur 231 avec un PNB/habitant de 23547dollars. Les budgets des états sont sous la forte pression des charges sociales très élevées à cause d’une population jeune et nombreuse, ce qui diminue les capacités d’investissement intérieur. Les salaires bas ne permettent pas à la grande majorité de la population, dans certains pays de l’Asie Pacifique, d’accéder au confort matériel et social. L’échec des politiques agricoles et le développement rapide des façades maritimes entraînent une forte migration des ruraux vers les villes côtières. En Chine en 1994, 40 millions de ruraux ont migré vers les Zones Économiques Spéciales (ZES) aménagées dans les villes de la façade Est.
5- Les limites de la dépendance financière
Avec la forte dépendance financière et commerciale l’Espace Asie- Pacifique subit les fluctuations de l’économie mondiale. En 10ans l’Asie a connue deux grandes crises économiques et financières, liées à des facteurs exogènes.
- La crise économique et financière de 1997- 1998: Elle est la manifestation la plus visible des limites structurelles du modèle asiatique. Cette crise s’est traduite par l’effondrement économique et social de certains pays comme l’Indonésie, la Thaïlande, les Philippines et le Malaisie .A cause d’une contraction de la demande extérieure en produits asiatiques, de la défaillance du système bancaire et de perte de compétitivité des industries l’Asie-Pacifique a enregistré une fuite des capitaux étrangers vers des destinations plus sures.
- La crise économique et financière de 2008- 2009: Elle a provoqué un ralentissement de l’activité économique des exportations. En effet, la forte réduction des importations des pays européens et nord-américain a eu un impact négatif sur les transactions commerciales des pays de l’espace Asie Pacifique. L’effondrement des exportations a provoqué une baisse de la production industrielle qui s’est manifestée par des fermetures d’usines et d’importantes pertes d’emplois. Ainsi, le Japon, la Corée du Sud, Singapour, Hong-Kong, la Malaisie et Taïwan ont réalisé des taux de croissance négatifs en 2009. A cause de la forte dépendance financière, les autorités disposent de faibles marges de manœuvre, pour définir des politiques de développement économique et social
CONCLUSION
La forte croissance économique enregistrée dans les pays de l’Asie Pacifique depuis la fin des années 60 a fait de cette espace l’un des pôles majeurs de l’économie mondiale. Cependant ces performances économiques doivent être relativisées parce qu’elles ne sont pas partout source de développement.