ETUDE DES CIVILISATIONS:1re Partie : LES CIVILISATIONS NEGRO-AFRICAINES
ETUDE DES CIVILISATIONS
Les civilisations de l‘Afrique noire: Le terme civilisation — dérivé indirectement du latin civis signifiant « citoyen » par l’intermédiaire de « civil » et « civiliser » — a été utilisé de différentes manières au cours de l’histoire. Il a en français trois grandes acceptions :
- la civilisation, dans l’acception la plus courante, est le fait de civiliser, c’est-à-dire de porter une société à un niveau considéré comme plus élevé et plus évolué, et c’est, par métonymie, l’état atteint par cette société évoluée. Cette acception inclut une notion de progrès. L’opposition historique aux termes de barbarie et sauvagerie tend à s’atténuer, notamment depuis l’annonce du principe du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ». Le statut d’égalité à toutes les civilisations est reconnu.
- la civilisation, c’est aussi l’ensemble des traits qui caractérisent l’état d’évolution d’une société donnée, tant sur le plan technique, intellectuel, politique que moral, sans porter de jugement de valeur. À ce titre, on peut parler de civilisations au pluriel et même de civilisations primitives (attention toutefois, le mot primitif peut être connoté à « inférieur ». Il faut le prendre ici sans jugement de valeur au sens de « premier » ou de « le plus ancien connu »).
l’état auquel sont parvenues quelques cultures dans l’histoire de l’humanité. Cette acceptation est dans la lignée directe des théories évolutionnistes du XIXe siècle, réfutées depuis au bénéfice de théories plus neutres.
I.LES CIVILISATIONS NEGRO-AFRICAINES
Il s‘agit ici des civilisations de l‘Afrique noire, disséminées dans la zone intertropicale. Il s‘y est développé des civilisations originales : « L‘Afrique est une boîte à conserve des anciennes civilisations ». Par cette affirmation, l‘historien allemand Frobenius faisait allusion à cette coexistence de couches culturelles qui présentent en leur sein des éléments témoignant d‘anciennes influences. Mais ces civilisations n‘ont pas su résister au phénomène colonial.
1- LES CONDITIONS GEOGRAPHIQUES
Elles sont relativement peu favorables. Elles ont façonné l‘implantation humaine et déterminent des genres de vie. Le rôle du relief est peu important ; c‘est surtout le climat qui est prédominant. La zone intertropicale où le trait essentiel est la chaleur (+20° en moyenne) est la plus accueillante à l‘homme. Dans les forêts équatoriales, l‘atmosphère est insalubre, les sols médiocres, pullulent des microbes, la vie est au ralenti.
2- LA FORMATION DU PEUPLEMENT
La présence humaine remonte à la préhistoire. C‘est le berceau de l‘humanité. L‘origine des populations est encore très mal connue. Certaines populations primitives subsistent encore tels que les Pygmées, les Hottentots et les Bochimans. Les vagues successives des migrations partiront du Nil supérieur vers l‘Ouest et le Sud dans les zones alors humides du Sahara et de la Mauritanie. Ces migrations sont à la source d‘une extrême complexité ethnique surtout dans les zones de passage.
On peut distinguer cinq sous-races noires : les guinéens, types moyens, les soudanais plus grands, les nilotiques, les congolais petits, les sud africains de coloration moins marquée (Zoulous). A ceux- ci s‘ajoutent les peuples métissés : Ethiopiens et Peuls.
La diversité linguistique est très importante : seize familles principales de langues, 700 dialectes environ au total.
3- LES GENRES DE VIE ET LES TECHNIQUES
- L‘agriculture extensive ne permet qu‘une alimentation déficiente. Le travail de la terre se fait partout sans engrais. Les rendements sont très faibles et le sol est préparé par « un feu de brousse ». L‘agriculture négro-africaine traditionnelle est une symbiose qui unit les humains, utilisateurs du sol, aux êtres invisibles, qui sont les véritables propriétaires. L‘élevage est étroitement dépendant des conditions climatiques. Les peuples pasteurs (peuls) sont nomades. Leur alimentation provient pour l‘essentiel du produit des
- L‘habitation et le vêtement varient suivant la région et le climat. Dans toute la zone nord soudanaise, c‘est la maison quadrangulaire d‘argile qui domine. En forêt, la maison est le plus souvent végétale. Le village est le vrai centre de la vie collective. Le vêtement dépend du climat, du genre de vie et de la
- L‘alimentation est presque toujours déséquilibrée et déficiente. En Afrique noire l‘alimentation est pauvre, les famines ne sont pas rares et les disettes temporaires. Les africains tiraient leurs subsistances de leurs plantations et de la cueillette à l‘exception des pêcheurs (poissons frais et fumés) ou des éleveurs (lait). La viande a joué un rôle très faible dans l‘alimentation en Divers interdits concernaient l‘alimentation.
- Les artisans occupent une place à part au sein de la société. Le forgeron est le principal technicien (secret de la métallurgie), il est selon les populations ou bien honoré ou bien méprisé mais toujours craint.
Il existe une répartition des activités techniques suivant le sexe. La femme ne travaille jamais le fer, les métaux précieux, le bois. Mais les deux sexes se partagent le travail de l‘argile, des matières colorantes et de la laine.
4- L’ORGANISATION SOCIALE POLITIQUE, ECONOMIQUE, RELIGIEUSE ET ARTISTIQUE
- La société africaine traditionnelle est essentiellement communautaire. La solidarité joue entre les membres d‘un même groupe, tous sensibles à leur commune C‘est dans le groupe que le noir trouve son équilibre. Il se sent heureux au milieu des rythmes de vie collective. Isolé, il perd une partie de sa confiance en soi.
- La cellule de base est la communauté familiale. Il s‘agit de la grande famille ou famille étendue composée de la réunion des descendants d‘un même ancêtre vivant dans le même lieu et formant une communauté économique (communauté de travail, de production et de consommation). Le chef est le plus ancien et tire son autorité du fait qu‘il est considéré comme mandataire des ancêtres. Le pouvoir se transmet de frère à frère dans l‘ordre de
- L‘intégration à la vie se fait par l‘intermédiaire de rituels appelés « initiation ». L‘enfant ne fait pas partie réellement du groupe avant la puberté. L‘appartenance à une classe d‘âge est liée à une commune initiation. C‘est une école de vie, marquée par des épreuves à l‘occasion d‘une retraite dans la brousse, dans un bois sacré, les épreuves physiques les plus pratiquées en Afrique noire sont la circoncision (garçons) et l‘excision (filles) Tous les humains appartenant à la même classe d‘âge sont unis toute leur vie par des liens
- L’organisation politique africaine est variée. Certaines sociétés ne vivent que dans le cadre du clan. D‘autres forment des tribus (ensemble de clans) dirigées par un chef dont l‘autorité est religieuse. Les assemblages de tribus forment des royaumes à la tête desquels se trouve un roi, personnage sacré. L‘Etat est par le fait même théocratique et la société hiérarchisée : aristocrates, lettrés, gens de commun, esclaves. Les conseils ont tenu une place importante dans la vie politique jusqu‘à la
- Les structures économiques : la propriété au sens occidental du terme n‘existe pas. La terre est la possession de la communauté villageoise. Les échanges ont pour fonction de manifester des liens sociaux. Exemple : la dot, les dons. L‘Afrique connaît les principes du marchandage et de la monétarisation, mais la fixation des prix est souvent étrangère à toute rationalité. Le commerce se heurte à de multiples impératifs dont les interdits (lait, viande de porc, bière, vêtements). Chaque société contraint ses membres à consommer certains produits : hécatombes de moutons aux fêtes, consommation de noix de cola
- Les fondements religieux : L‘importance des croyances et du sacré dans les sociétés africaines est supérieure à celle des autres sociétés. La conception du monde de l‘Afrique noire est imprégnée de religion et de magie. Les religions sont multiples. Les puissances invisibles sont nombreuses : les totems, les mânes ou cultes des ancêtres, les divinités responsables de l‘ordre ou du désordre de l‘Univers. Les cultes sont réglés avec minutie, rien n‘est laissé au hasard. on trouve parfois des cycles rituels. Les rites sont effectués dans les lieux particuliers où séjournent les puissances Les religions de l‘Afrique noire, longtemps très mal connues, étaient considérées comme des pratiques fétichistes sans grande portée. Les confréries regroupent autour d‘un personnage central quelques centaines de fidèles. Ces confréries sont hiérarchisées et la discipline qui y règne est stricte.
- La création artistique et littéraire : l‘Afrique noire mêle le plus souvent les genres. Ses chansons et même ses contes sont dramatisés, mimés, chantés et souvent appuyés par la musique. Il s‘agit d‘arts littéraires plutôt que de littératures. Ce sont les griots qui sont les récitants en Afrique Occidentale. Cette littérature orale est souvent « engagée ». Elle exprime les idéaux du groupe ou fait la satire.
Dans les sociétés africaines, le créateur exprime le consensus profond du groupe. Il traduit le sentiment commun du groupe surtout dans la sculpture et la décoration.
5- EVOLUTION DU MONDE NEGRO-AFRICAIN
a-Ŕ L’IMPACT DE L’ISLAM
Dès les premiers siècles de son expansion, l‘Islam a investi l‘Afrique noire par l‘infiltration pacifique des caravaniers commerçants et aussi par l‘action conquérante des confréries guerrières ou maraboutiques.
En Afrique Occidentale par exemple, le mouvement almoravide a aidé au XIe siècle à la propagation de l‘Islam puis suit la phase pacifique des empires du Ghana, du Mali, du Songhaï,
ensuite vient la phase conquérante du XIXe siècle avec les peuls et les toucouleurs, enfin la phase pacifique du début du XXe siècle animée par des marabouts ou Cheikh confrériques ayant une ascendance morale et spirituelle sur les adeptes. Les principales confréries sont la Qadriya, la Tidjania, le Mouridisme, le Hamallisme (Mali).
La simplicité du message (la Shahada, les 5 prières quotidiennes, le jeûne, la zakat, le pèlerinage), sa morale accommodante avec les coutumes africaines (polygamie, circoncision, rôle du marabout en tant que directeur de conscience) expliquent le succès en Afrique. L‘Islam a introduit la culture et le tissage du coton, condamné l‘usage de la viande de porc, de boire du vin, favorisé l‘élevage du mouton, le trafic de la cola. Sur le plan social, l‘Islam va contribuer à combattre l‘existence de castes, à prôner la solidarité mutuelle (Zakat). Sur le plan politique, on notera l‘apparition de théocraties où l‘Almamy concentre entre ses mains le pouvoir temporel et spirituel. Des pratiques tirées de la constitution coutumière (matriarcat, héritage, problèmes de ménage etc.)
b-Ŕ L’IMPACT DE DU CHRISTIANISME ET DE LA COLONISATION
L‘influence du christianisme est surtout visible au sein des populations urbanisées. Il fait dire que son impact se confond avec celui de la colonisation. Le rattachement de l‘économie africaine à celle de l‘Europe au XIXe et XXe siècle a eu de multiples conséquences :
- L’introduction de la monnaie : les paysans, pour payer l‘impôt et acheter de nouveaux produits manufacturés ont privilégié les cultures commerciales au détriment de cultures vivrières.
- La construction de voies de communication : elle est commandée par un besoin de collecter et drainer les produits agricoles et miniers de l‘intérieur vers les ports. Cet équipement n‘a pas visé un développement d‘ensemble équilibré de toute une région.
- Les transformations sociales : elles se manifestent à travers plusieurs
- Augmentation numérique de la population qui résulte des progrès médicaux,
- Grande mobilité de la population attirée par les plantations, les ports, les usines et développement de l‘urbanisation facilité par les voies de
- Inégalités sociales : en milieu rural, le travail communautaire fait face à l‘appropriation individuelle de la terre ce qui permet au plus actifs d‘être plus riches que les autres ; en milieu urbain, c‘est l‘émergence de la bourgeoisie riche et des prolétaires aux conditions de vie misérables.
- Eclatement des anciens cadres sociaux dans les villes qui a soustrait les individus aux coutumes tribales et a entraîné la détribalisation. La grande famille traditionnelle élastique tend à se fractionner en ménages indépendants. Un fossé se creuse entre ruraux et citadins, entre jeunes et anciens. Les jeunes sans fortunes dans les villes restent célibataires pendant longtemps et la femme est devenue un objet que l‘on achète.
La détérioration des termes de l’échange : les pays anciennement colonisés fournissent au marché mondial des produits de base dont les cours varient énormément et les prix très bas en raison de la surproduction alors qu‘ils achètent des produits manufacturés de plus en plus
CONCLUSION:
Les civilisations négro-africaines ont été largement entamées au nord par l‘influence de l‘Islam depuis le XIe siècle et par celle de l‘occident depuis la fin du XIXe siècle. Malgré les assauts répétés de la civilisation occidentale par le biais des médias, les civilisations négro-africaines connaissent un regain de vitalité et d‘intérêt par le souci de préservation par les populations africaines de leurs valeurs de civilisation, leur identité culturelle.