LES COURANTS LITTERAIRES
I-DEFINITION
On appelle courant littéraire l’ensemble des ressemblances (des convergences volontaires ou fortuites) chez les écrivains d’une génération donnée quant à leur vision du monde, leur manière de rendre le réel dans leurs œuvres. A travers ces tendances on note les différentes perceptions de l’art selon l’époque, les auteurs etc.
Même s’il n’est pas prudent de fixer une date pour l’origine des courants littéraires, on peut retenir que la mode ne s’installe véritablement qu’au XIXe siècle. Toutefois on peut remonter jusqu’au XVIe siècle avec l’humanisme si l’on considère le courant littéraire comme étant à la fois un ensemble idéologique et artistique. Ainsi, au XVIe siécle, nous avons l’Humanisme, au XVIIe siècle le Classicisme, au XVIIIe siècle, le Rationalisme et le Préromantisme, au XIXe siècle, le Romantisme, le Réalisme, le Naturalisme, le Parnasse, le Symbolisme et au XXe siècle le Surréalisme.
II-LES DIFFERNTS COURANTS LITTERAIRES
A-L’HUMANISME : XVIE SIECLE
Il correspond au XVIe siècle et recommande que l’on s’inspire des textes anciens de la tradition grecque et latine. Le mot « humanitas » désignant en latin « la culture », les écrivains de cette époque appellent leur enseignement « Lettres d’humanité » et on les nommera eux-mêmes Humanistes.
Ce mouvement coïncide avec le besoin de renaissance senti par la France. Elle consiste à une rénovation littéraire, artistique et scientifique sous l’impulsion de la culture antique remise à l’honneur. Les écrivains vont retourner aux sources anciennes et aux textes religieux pour sortir la civilisation française de sa torpeur. Les hommes de cette époque ont la conviction de vivre un nouvel âge d’or, une « renaissance ». Cette renaissance à pour origine les voyages (découverte de nouveaux horizon) et de l’apparition du livre (l’imprimerie, la gravure). En outre, le contact avec l’Italie permit à la France de découvrir une société élégante, une vie luxueuse et raffinée. L’humanisme désigne par ailleurs une élégance morale, la courtoisie, la politesse, en quelques mots toutes les qualités inséparables de la culture. Ainsi, le mouvement humaniste en viendra à désigner un idéal de la sagesse en plus de la formation à l’école de la pensée gréco- latine. Les humanistes proposent un idéal de faire et de sagesse humaine. Ils prônent selon la belle formule de Michel de Montaigne (1533-1592) : « de faire bien l’homme ». Les humanistes rejettent le moyen âge et se tourne vers la culture antique.
Les conséquences de l’Humanisme seront beaucoup plus visibles sur le plan religieux avec Erasme (1439 1536) et Calvin. Ce mouvement appelé la réforme aboutit au protestantisme : refus des cultes des Saints, rejet de l’autorité du Pape, entrainant ainsi une rupture avec la tradition biblique. Malgré les efforts de François Ier pour encourager et contribuer à la naissance d’aspiration nouvelle, au niveau religieux les contestations vont crescendo. L’affaire des placards (contestation de la messe papale en 1534) active les événements. Le roi prit des mesures de répressions. L’esprit de libre examen et une lecture authentique de la bible n’arrange pas les choses. Entre 1562 et 1598, huit guerres séparées de trêves fragiles ensanglantent la France dont on peut retenir le Massacre de protestants à Wassy en 1562 et la sévère répression du parti protestant à La Saint Barthélemy à Paris dans la nuit 24 aout 1572.
L’arrivée d’Henri IV avec la promulgation de l’Edit de Nantes (1598) qui donne un statut légale à l’église réformée, apaise les tensions. Ces guerres marquent profondément la vie littéraire. Agrippa d’Aubigné(Les tragiques 1616), et Ronsard (Discours des misères de ce temps, 1532) se positionne fortement dans leurs œuvres. La littérature s’engage et devient une arme de propagande. Dans ses Essais, Montaigne affiche un scepticisme tolèrant. Il refuse la confrontation et adopte une sagesse à la taille de l’homme. Ce militantisme apparait comme une première manifestation de la littérature engagée. La poésie rend compte des conflits et adopte un ton plus polémique. Dans leur programme d’éducation, ils ne se limitent pas au goût de l’éthique. François Rabelais (1494-1553) montre que l’effort intellectuel doit être complété par un entrainement physique intense et varié.
- LA PLEIADE : 1556
Elle tire son nom de la mythologie grecque et désigne une constellation de sept étoiles. Le mot réapparait au XVIe siècle pour désigner un groupe de poètes rassemblé autour de François Ronsard (1524-1585), le « prince des poètes ». Leur mérite a surtout été de rivaliser avec les poètes grecs et latins en montrant que la langue française pourrait signifier autant que les langues anciennes. Ils publient sous la direction de Joachim Du Bellay, Défense et illustration de la langue française qui en fait est le manifeste du groupe et se donne comme objectif d’enrichir le français en retrouvant des mots anciens, de défendre la langue française du grec et du latin.
La pléiade rassemble en 1556 de jeune poétes comme Baïf, Belleau, Jodelle, Pelletier du Mans, Pontus de Tyard, Du Bellay et Ronsard.
B-L’EPOQUE CLASSIQUE : LE XVIIE SIECLE
Le XVIIe siècle apparait sans conteste comme le siècle du théâtre. Cependant, il est traversé par plusieurs courants littéraires.
1-LE BAROQUE
Défini négativement comme l’envers du classicisme, le baroque est marqué par l’excès, la démesure, tout ce qui est exagéré. Il manifeste un goût excessif pour le mélange des genres. Ce refus de saisir la réalité cumule les formes.
L’esprit baroque est présent chez Corneille (la tragi-comédie), Agrippa d’Aubigné etc. En poésie, on note l’usage d’images fortes et d’antithèses.
2-LA PRECIOSITE
A l’origine, on appelle « précieuse », les dames du grand monde qui, selon le mot de ABBE DE PURE, « se tirent du prix commun des autres », c’est-à-dire s’élèvent au dessus du vulgaire par la dignité des mœurs, l’élégance de la tenue, la pureté du langage. Cette attitude se caractérise autour des années 1630 dans les salons aristocratiques. L’esprit précieux se manifeste dans les manières, les sentiments, le goût. Dans le langage se sont des exagérations, des périphrases, la pointe.
Molière et Malherbe s’élèvent contre la préciosité. Le premier en donne une caricature justifiée par le refus du naturel et la recherche de l’artifice dans les précieuses ridicules, le second épure la langue et fonde le français classique. Il annonce le classicisme
3-LE CLASSICISME : 1660-1685
Il correspond à l’avènement de Louis XIV avec la monarchie absolue de 1660. C’est un courant qui cherche l’idéal esthétique, la précision et la nuance. Il a été inspiré par le désire d’ordonner, de réglementer la production littéraire disparate du XVIe siècle. Il se caractérise par un idéal esthétique, un idéal humain et l’art de plaire.
- L’idéal esthétique
Les références de l’Antiquité abondent dans l’art classique : la connaissance de la mythologie, la littérature grecque et latine. Cette imitation est au contraire pour eux une garantie de perfection. Car l’antiquité est un modèle. Les anciens ont laissé des œuvres qui ont franchi les siècles. Cette capacité à durer, est aux yeux des classiques la marque de l’excellence. Il faut donc suivre les anciens pour construire des œuvres qui puissent s’imposer à leur tour. C’est ce qui explique l’existence dans leurs œuvres d’un souci de l’universel, d’une autorité de la raison, d’une bienséance et d’une vraisemblance, mais surtout d’une volonté de réglementation de la littérature.
- Le souci de l’universel
La société du XVIIe siècle repose sur la tradition. L’homme, pense-t-on est immuable. Les œuvres classiques expriment cette conception même lorsqu’elles parlent du présent, elles dépassent le cadre historique pour peindre, l’homme de 1660, l’homme éternel. Plus que l’individu, c’est la nature humaine qui intéresse les classiques.
- L’autorité de la raison
Les classiques entendent par le mot raison, le bon sens, partagé par le plus grand nombre. Le bon sens impose que l’on ne s’écarte pas de ce qui peut être normalement accepté par l’esprit. La raison impose aussi que l’on suive des principes qui on déjà fait leur preuve. Les règles sont la forme strictement codifiée de ces principes. Elles s’imposent avec rigueur dans le théâtre et représentent des contraintes.
- La Bienséance et la Vraisemblance : les conventions sociales
Le théâtre est un mode d’expression concret. C’est également un art social. Il y est difficile d’aller à l’encontre des conventions sociales. Il convient de ne pas représenter des faits qui pourraient paraître invraisemblables : les scènes de torture, les propos indécents. On ne meurt pas sur scène, on y mange pas, on ne s’y bat pas. Nous avons au XVIIe siècle un théâtre de la mesure et de la concentration.
Au XVIIe siècle, la doctrine classique apparait plus comme une série de rejet qu’un ensemble de normes. Le seul but est de plaire. Elle se ferme sur « la querelle des anciens et des modernes qui annonce le siècle des lumières.
- Le respect des régles d’écriture
Durant cette période, en art chaque genre a ses règles. En théâtre on note les plus grandes productions avec Jean Racine, Pierre Corneille et Molière. Il repose sur un certain nombre d’impératif : la règle des trois unités, la bienséance et la vraisemblance, le sens de la mesure. Les anciens du théâtre antique sont pris comme modèles : Sophocle, Aristophane, Euripide (imitation des anciens).
- La règle des trois unités
- L’unité de temps : une limitation de la durée de la fiction.
C’est une conséquence directe de la concentration. S’il y a peu d’événement il ya peu de temps occupé par ces événements. Le spectateur vit un temps obligé. Donc, par souci de vraisemblance, la durée de l’action ne doit pas dépasser 24h (un jour).
- L’unité de lieu : une seule scène, un seul lieu fictif.
Au nom de la vraisemblance, le théâtre classique choisit la coïncidence entre le lieu de l’action et la scène.
Pour le spectateur le lieu est bien réel inscrit dans un décor, sous ses yeux. Une seule scène, un seul décor, un seul lieu, tel est l’impératif qui s’affirme peu à peu.
- L’unité d’action : une exigence de concentration.
L’action d’une pièce de théâtre doit être concentrée. Au moment où elle est représentée, elle a obligatoirement une dimension limitée. La pièce doit être unifiée autour d’un sujet principal.
Dans son art poétique, Nicolas Boileau résume cette règle en ces termes : « en un jour, en un lieu, un seul fait accompli ». A ces exigences s’ajoute souvent l’unité de ton. Les dramaturges refusent aussi le mélange des genres.
Dans la tragédie, l’action mêle intrigue sentimentale et intrigue politique. Et met en scène des personnages éminents (roi, prince, princesse…) et le dénouement est tragique.
La comédie représente des gens de moyenne ou de petite condition et se termine par un dénouement heureux.
- Un idéal humain
- L’honnete homme
Chaque société se donne comme idéal un certain type humain. Au XVIIe siècle, c’est l’honnête homme : l’homme cultivé avec une intelligence ouverte (sans être pédant) distingué, galant, courtois, élégant, au courant de toutes les convenances mondaines. L’honnête homme est aussi un homme ouvert, curieux d’esprit, savant parfois mais sans faire étalage de ses connaissances et au milieu où il se trouve.
- L’art de plaire
C’est à ce talent que l’on juge l’homme du monde. Plaire, impose que l’on sache être profond tout en divertissant. La Fontaine par exemple instruit ses lecteurs, mais sa morale passe par l’agrément de la fable.
On voit ici que les qualités humaines et la morale rejoignent les ambitions artistiques et les formes même de l’art. C’est que le classicisme forme un tout. Ceci explique que le mot de « classique » est un emploi et une signification très larges.
En effet, bien que le classicisme soit le reflet d’un état politique et social très précis, il dépasse ces limites historiques et renvoie à une valeur beaucoup plus générale. Dès le XVIIe siècle, on désigne par « classique » ce qui constituait par ses qualités une référence à suivre. Est classique ce qui est « digne d’être enseigné dans les classes », ce qui mérite d’être « pris pour modèle ». Aujourd’hui, le mot appliqué à toute sorte de domaine, sert à qualifier un idéal d’ordre, de rigueur, de clarté et de sobriété, et des œuvres capables de suivre aux variations des modes.
Ainsi le classicisme était mû par le souci d’améliorer la société en critiquant les défauts provoqués par la nature humaine. Il s’attaque aux mœurs jugées mauvaises et exalte une conduite incarnée par « l’honnête l’homme ».
Confère : les comédies de Molière (Jean baptiste Poquelin) : les caractères de la Bruyère : les fables de Jean de la Fontaine : les Maximes de la Rochefoucauld : la princesse de Clèves de madame de la Fayette.
« L’honnête homme » condamne les excès et prône le bon sens qui s’efforce d’être claire et agréable.
C-LE SIECLE DES LUMIERES : LE XVIIIE SIECLE
1-LE RATIONALISME PHILOSOPHIQUE OU PHILOSOPHIE DES LUMIERES.
Au pluriel, « Lumières » signifie intelligence, savoir, capacité intellectuelle. Les lumières désignent un mouvement intellectuel européen. C’est aussi le XVIIIe en tant que période de l’histoire de la culture européenne marquée par le rationalisme philosophique et l’exaltation des sciences. Ainsi, esprit critique, expérience et raison deviennent les maîtres-mots.
Préparé par Montesquieu (L’esprit des rois), Voltaire (Dictionnaire Philosophique), Diderot et Jean critiquent pour condamner les abus politiques (la monarchie absolue), les injustices sociales et religieuses (Tiers Etats dans la misère), le fanatisme et l’intolérance, le despotisme. Ils cherchent la vérité derrière les ténèbres des préjugés à l’aide de la raison. Il faut être utile à la collectivité en organisant une nouvelle vision de l’univers. Le centre de cette pensée n’est plus la religion mais l’homme considéré comme un être libre et raisonnant.
Cet élan se manifeste par le militantisme des écrivains par le biais de la littérature. La diffusion de cette littérature de propagande s’attaque aux dogmes et ébranle en même temps le système religieux. On s’attaque à l’ordre social et à la hiérarchie religieuse.
C’est ainsi qu’une littérature qui diffuse des idées nouvelles et prépare la révolution de 1789. Elle a confiance en la raison et au progrès et recherche le bonheur sur terre.
La grande œuvre des « lumière » est l’encyclopédie (1751-1772). Des penseurs ou « philosophes », parce que intervenant dans des domaines variés, se groupent pour publier une œuvre monumentale. Cet ouvrage nouveau contribue à la révolution française de 1789. Le 14 juillet 1789 un peuple affamé, spolié, se dresse contre toutes les injustices et prend la bastille symbole de la dictature et du despotisme.
2-LE PRE-ROMANTISME
Vers la fin du XVIIIe siècle une sensibilité se développe. Elle va à l’encontre des disciplines de l’époque. Diderot et Rousseau accordent une place importante aux sentiments. Le sentiment apparait comme un instinct plus vrai et plus sûr que la raison. Le cœur l’emporte sur la raison. Et il sera au cœur des œuvres de ces écrivains à travers les hymnes à la nature.
L’inquiétude, le sentiment d’être victime de la fatalité et l’impuissance à l’égard des passions sont les thèmes que l’on retrouve dans presque tous les romans de l’Abbé Prévost. L’histoire du chevalier des Grieux et de Manon L’Escaut. Leur sensibilité conduit la plupart des écrivains à exprimer leur moi, leur mélancolie, leur nostalgie.
Diderot réhabilite les passions. Il souligne dans un article : « A mesure que l’esprit acquière plus de lumières, le cœur acquière plus de sensibilité. »
On retrouve chez Rousseau et ses contemporains le goût de la confession, la fuite au sein de la nature protectrice, les tourments de l’absence, l’inquiétude face à la fuite du temps, le désir d’éterniser l’amour par le souvenir. Ainsi ces écrivains annoncent le romantisme.
D-LE XIXe SIECLE
Le XIXe siècle est traversé par plusieurs courants littéraires : le romantisme, le réalisme et le symbolisme. Le naturalisme prolongera le réalisme et l’école parnassienne marquera une rupture dans la conception de l’art avant le symbolisme. Plusieurs conceptions de l’art se développeront, mais chacun correspond à une vision du monde et de l’homme. Mais en fait, ils s’entremêlent de l’un à l’autre à des échanges féconds.
1-LE ROMANTISME : 1820-1843
Généralement on fixe son avènement avec la publication de Les Méditations Poétiques de LAMARTINE en 1820.
Il est difficile de définir le romantisme dans sa diversité. Préférant l’imagination et la sensibilité à la raison classique, il se manifeste d’abord par un magnifique épanouissement du lyrisme personnel. Il consiste à l’éveil de la sensibilité personnelle, l’exaltation du moi et la communion avec la nature. La primauté de l’émotion sur l’intellectualité est la première caractéristique.
Au plan littéraire, il regroupe Victor Hugo et ses contemporains autour de Cénacles. Ils préconisent entre autres objectifs de :
- Libérer l’art, c’est-à-dire abandonner les règles classiques : réagir contre le principe d’imitation : pas de sujet tabou.
- Adopter l’individualisme dans l’art : droit pour l’écrivain de prendre ses propres sentiments.
- Bouleverser les formes fixes.
Ainsi le romantisme est une réaction contre les excès rationalisme classique. Il cherche à réhabiliter le rêve d’autant plus que la réalité sociale est marquée par la misère. Les écrivains romantiques souffraient du vague de l’âme. Ils étaient mélancoliques et avaient l’air malade, pales, maigres.
En poésie, Hugo, Alfred de Musset et Alphonse de Lamartine donnent libre cours au lyrisme qu’accompagne une libération de l’art en réaction contre la rigidité classique. Ils prennent le contre-pied de l’esprit des lumières. Musset s’écrie : « Il faut déraisonner ». Hugo propose de « briser l’alexandrin ». Le poète romantique se réfugie dans la nature qui lui apparait comme une confidente. Le romantisme découvre dans la poésie la voie permettant d’approcher mieux que la raison, l’essence du monde.
En théâtre, le romantisme précipite le déclin des anciens genres dramatiques. Les dramaturges renoncent à la règle des trois unités afin de dérouler une intrigue historique. Ils rejettent comme contraire à la vérité des unités de temps et de lieu Cf. Cromwell de Hugo.
Le XIXe siècle coïncide avec l’essor prodigieux du roman. Il se développe dans tous les sens et adopte toutes les formes. On note le roman historique, fantastique, d’analyse… A mesure qu’avance le romantisme, la tendance réaliste s’amplifie même si le genre de prédilection du romantisme demeure la poésie.
La génération romantique développe les thèmes de l’originalité d’un moment, d’un lieu, d’une sensation devant la fuite du temps, de l’amour et de la nostalgie.
Les animateurs étaient d’esprit indépendant pour obéir à un mot d’ordre. Le mouvement va connaitre des visages multiples. C’est pourquoi Hugo déclare que « Le romantisme n’est que libéralisme en littérature. »
Le romantisme tombe malheureusement dans un certain excès qui lui fait oublier totalement le réel au seul profit de l’imaginaire. Cela va entrainer la réaction qui aboutit au réalisme.
2-LE REALISME
Il s’impose à partir de 1850. C’est une réaction de révolte contre le romantisme dans la mesure où celui- ci après avoir proclamé sa volonté de s’inscrire dans le réel s’égard dans le mystérieux, le fantastique, l’imaginaire.
Le réalisme se donne comme objectif de reproduire la réalité dans sa totalité, qu’elle soit belle ou cruelle, il prône le respect des faits matériels et proclame sa volonté d’étudier le comportement des hommes dans leur milieu. Il tente d’associer écriture et réalité. Le réalisme s’efforce d’être le témoin du temps présent. Il affirme son rejet de tout ce qui touche à la métaphysique, à l’imagination et au rêve. Le genre de prédilection du réalisme serait le roman. Cependant selon les autres réalistes considérés, on relève des nuances plus ou moins importantes dans leur conception. Pour Balzac le roman équivaut à une histoire des mœurs. Il prône l’enracinement dans le réel comme Stendhal pour qui « le roman est un miroir que l’on promène le long du chemin ». Il se propose de faire l’inventaire du réel dans une série de romans : La Comédie-Humaine (faire concurrence à l’Etat-civil).
Toutefois entre Balzac et Stendhal on peut relever une différence qui est chez le premier l’accent mis sur ce qui est extérieur tandis que chez l’autre le réalisme est surtout psychologique. Ces écrivains associent au réalisme du cadre le romantisme des caractères.
Chez Flaubert, le réalisme devient impersonnel. C’est-à-dire que l’auteur doit être froid, placide (ne faire apparaitre aucun sentiment). Pour lui, la peinture du monde extérieur ne peut être réalisée par l’effacement du créateur, le renoncement à la subjectivité, l’impartialité. Mieux l’auteur doit s’effacer pour donner l’impression de n’avoir jamais existé en vue de rendre l’histoire racontée plus vraie : narration à la 3eme personne, distanciation, focalisation où le romancier ne serait qu’un simple historien.
La réalité est amputée de choses aussi essentielles que des notions abstraites comme la fidélité, la foi, l’émotion, étant entendu que le réalisme se détourne de tout ce qui ne peut pas être appréhendé par nos organes de sens. Si le texte réaliste est présenté comme vrai, il n’en est pas moins le produit d’une récréation. Zola se fait le champion du réalisme extrême qu’il baptise « naturalisme ».
3-LE NATURALISME : (1866-1880)
Ce n’est pas à proprement parlé une école littéraire puisqu’il n’est qu’un développement, une évolution du réalisme vers les conceptions plus audacieuses, extrémistes. Zola en fixe la théorie entre 1866-1880. Les frères Goncourt en avaient exposé les premiers éléments. Le naturalisme avait réuni autour de Zola quelques écrivains réalistes qui finiront par abandonner les conceptions naturalistes. Il entend appliquer à l’étude des réalités humaine la méthode des sciences expérimentales. Selon cette conception, la psychologie de l’individu est déterminée par la physiologie. C’est pourquoi le romancier naturaliste insistera sur tout particulièrement sur les conditions dans lesquelles évolue le personnage, condition qui déterminent sa conception, son action, ses pulsions. La conséquence d’une telle conception est que le naturalisme fait une peinture physiologique qui accorde une très grande importance aux instincts, « à la bête humaine ».
Il en résulte un climat de vulgarité matériel qui choque même certains partisans du naturalisme qui décident alors de publier une brochure intitulée « Manifeste des cinq » pour proclamer leur rejet de cette tendance. De plus leur prétention à faire des romans des expériences sociologiques, tourne court. Le naturalisme perd progressivement de son intérêt pour disparaitre totalement avec la mort de Zola en 1902.
La littérature devient inapte devant sa volonté d’adopter une démarche purement scientifique.
4-LE PARNASSE : « L’ART POUR L’ART »
Le parnasse est une réaction devant les excès sentimentaux du romantisme. Il prône la retenue, l’objectivité et l’impersonnalité, Il rejette absolument l’engagement social et politique de l’artiste et prone le culte de « l’art pour l’art » théorisé par Théophile Gautier dans la préface de son roman, Mademoiselle de Maupin. Ce mouvement réhabilite aussi le travail acharné et minutieux de l’artiste par opposition à l’inspiration immédiate du romantisme. Le poète devient ainsi un artisan des mots.
Pour les Parnassiens l’art n’a pas à être utile ou vertueux et son seul but est la beauté. Théophile Gautier écrira en ce sens : « Il n’y a de vraiment beau que ce qui ne peut servir à rien ; tout ce qui est utile est laid ». C’est pourquoi, les parnassiens recherchent pour leur poème une forme pure pour réaliser la beauté qui est éternelle. Le poète devient ainsi un artiste et son poème tire sa beauté de sa réussite esthétique et non de la morale ou de l’émotion du poète. C’est d’ailleurs ce qui pousse Charles Baudelaire à écrire : « la moralité d’une œuvre d’art, c’est sa beauté ». Par rapport à la poésie, il ajoutera : « la poésie n’a d’autre but qu’elle même ; elle ne peut en avoir d’autre, et aucun poème ne sera si grand, si noble, si véritablement digne du nom de poème, que celui qui aura été écrit pour le plaisir d’écrire un poème. »
Les Parnassiens privilégiaient l’innovation formelle allant de pair avec la recherche de la perfection formelle : le travail sur la versification, le mètre, la strophe, la recherche d’une perfection technique. Ainsi, le poème doit être raisonné, c’es-à-dire écrit avec précision. Le poète doit donc faire appelle à des images, un vocabulaire riche et précieux, un rythme oratoire qui respecte la forme et recherche la rime. C’est dans ce sens que Théophile Gautier propose au poète le travaille de l’artisan. Il note en effet : « Sculpte, lime, cisèle ; / Que ton rêve flottant / Se scelle / Dans le bloc résistant ! »
Parmi les auteurs parnassiens on peut citer : Théophile Gautier ; Théodore de Banville. Charles Marie René Leconte de Lisle, considéré comme la tête de file du mouvement, Catulle Mendès, Sully Prudhomme, José-María de Heredia, François Coppée, Léon Dierx, Charles Baudelaire, Paul Verlaine, Stéphane Mallarmé. À signaler aussi le rôle passager d’Anatole France, qui écrivit de la poésie à ses débuts. Le Parnasse contemporain initia Arthur Rimbaud à la poésie de son temps, Francis Jammes, Paul-Jean Toulet.
La politique de l’art pour l’art ou de l’art pur ne convient pas à tout le monde. Ainsi, beaucoup d’écrivains vont critiquer ce mouvement et le quitter ensuite. C’est le cas de Charles Baudelaire, de Paul Verlaine et de Stéphane Mallarmé. Pour Baudelaire, la beauté n’est pas seulement la beauté apparente des formes, mais aussi, la beauté mystique. Sensible pendant quelques temps à ce mouvement, Verlaine va s’opposer au parnasse parce que la poésie parnassienne est descriptive, intellectuelle et ne voit les choses que de l’extérieur. En plus, il considère qu’il est impossible que le poète soit impersonnel dans ses œuvres. Quant à Mallarmé, s’il prône la technique de la forme, elle est orientée vers la mystique symboliste.
5-LE SYMBOLISME :
Le symbolisme est un mouvement poétique, littéraire et artistique qui s’est développé en France à la fin du xixe siècle. Il va s’imposer véritablement vers les années 1880.
Le symbolisme est moins un mouvement littéraire constitué qu’un courant de sensibilité, caractérisé par une certaine inquiétude métaphysique, par une croyance en l’existence d’un monde suprasensible et en un pouvoir révélateur de l’œuvre d’art, faisant ainsi du réel un univers de signes à déchiffrer. Les symbolistes accordent en outre une grande importance au travail poétique et font de l’harmonie entre le fond et la forme la valeur première de toute création. Sur le plan esthétique, ils s’opposent fortement aux courants réaliste et naturaliste.
L’une des caractéristiques particulières du symbolisme est l’utilisation du symbole (être ou objet représentant une chose abstraite) dans la création poétique. Pour les symbolistes, l’art doit aller au-delà des apparences formelles pour découvrir l’âme des choses et les plaisirs des sensations rares. Ils considèrent que le monde, loin de se réduire à la matière est constitué des représentations, des signes dont nous le peuplons. C’est dans ce sens que Baudelaire dira : « C’est cet immortel instinct du beau qui nous fais considérer la terre et ses spectacles comme un aperçu, comme une correspondance du ciel ». Les poètes symbolistes vont conférer au symbole une puissance mystique et vont en faire un moyen d’accès au monde des essences, au monde suprasensible. La poésie devient ainsi, une connaissance du monde et de l’homme comme le note encore Baudelaire quand il écrit : « C’est à la fois par et à travers la poésie, par et à travers la musique, que l’âme entrevoie les splendeurs situées derrière le tombeau ». A travers l’utilisation du symbole donc, le symbolisme montre cette part du monde sensible qui éveille l’âme au monde spirituel. La poésie devient un lieu de passage et le symbole le talisman qui nous ouvre la porte du monde invisible.
Sur le plan formel, les auteurs symbolistes, se lanceront dans l’aventure du vers libre. Le poème est appréhendé comme une forme autonome, définissant, à chaque vers, son mètre, sans respect de la rime, au profit de la musicalité de la langue.
Au moment où Jean Moréas publie un manifeste littéraire consacrant la naissance de l’école symboliste, les grands poètes qualifiés du symbolisme sont morts (Baudelaire, Lautréamont) ou ont cessé de produire (Rimbaud) ou encore ont donné essentielle de leurs œuvres (Verlaine, Mallarmé).
Même s’il est de courte durée, le symbolisme a permis de montrer que la poésie ne doit plus être un discours rationnel, une effusion sentimentale, mais exprimer ce qui est inaccessible à la science car dépasse l’art et le simple.
E-LE SURREALISME : XXE SIECLE
Le mouvement dada annonce le surréalisme. Le dadaïsme est un mouvement artistique animé par un esprit de révolte, de provocation et de dérision contre l’art bourgeois et l’ordre établi, lancé par Tristan TZARA au début du Xxe siècle. Il est à l’origine du surréalisme.
Pendant la première guerre mondiale, un étudiant en médicine qui est souvent affecté dans les centres neuropsychiatriques, s’intéresse aux travaux du savant viennois Sigmund FREUD. Il était déjà sensible à l’influence poétique de Baudelaire et de Mallarmé. Il découvre les possibilités immenses offertes à la littérature, par une exploration systématique de l’inconscient.
L’influence de ce médecin, André Breton, va attirer d’autres intellectuels qui se joindront à lui pour former le courant surréaliste à partir de 1919 : ce sont Philippe SOUPAULT et Louis ARAGON.
Né du refus de la civilisation actuelle, il se propose de libérer le langage de toutes les entraves de la morale ou de la conscience. Il s’agit donc au départ d’une révolte, d’un désir de renverser l’art, la morale et la société. Les artistes surréalistes (Breton, Eluard, Aragon…) se donnent pour mission de saisir ce qui, en l’homme, échappe à la conscience, tout ce qui est non rationnel et pourtant bien réel dans l’activité de l’esprit.
Pour sonder l’inconscient, le doute surréaliste prône le recours à l’écriture automatique c’est-à-dire une écriture sans contrôle de la raison. Au départ, le succès de ce courant est spectaculaire, car pour les écrivains, il ouvre des perspectives illimitées notamment dans l’invention des nouvelles images.
Mais ce courant finit dans une impasse tout d’abord parce qu’il e une conception suicidaire (destruction de la littérature et du langage chez les dadaïstes). Mais encor il finit à ne plus faire amuser le public qui cherche avant tout dans un livre à comprendre. Tout cela conduit les grands auteurs surréalistes à évoluer vers des conceptions individuelles de la littérature, conceptions qui seront toutes marquées de l’héritage surréaliste. On appelle ses écrivains qui se détachent du surréalisme tout en continuant d’être influencé par lui, des francs tireurs.
CONCLUSION
Du XVIe au XXe siècle, la littérature française est marquée par de nombreux courants littéraires. Ces manifestations reflètent les différentes conceptions de l’art selon les époques et selon les écrivains. Il s’agit de côtoyer le réel afin d’obtenir une meilleure conception du monde en quelque sorte de la nature humaine.